Gouverner c’est aussi savoir sécuriser
La Guinée-équatoriale est un pays pacifiste : elle a toujours recherché, depuis son indépendance, en 1968, l’harmonie et l’entente avec ses voisins directs, mais aussi avec tous les pays du monde.
Elle n’a jamais été à l’origine des conflits visant la déstabilisation d’une région, elle n’a jamais été impliquée non plus dans des opérations illégales, comme celles qui ont pour but l’affaiblissement d’une nation ou le soulèvement d’un peuple.
C’est que la Guinée-équatoriale tient à sa tradition de pays pacifiste. Privilégier le dialogue et la négociation, à travers des institutions de renom comme l’OUA et l’ONU, au détriment de l’affrontement, sont les caractéristiques majeures de sa diplomatie.
La Guinée-équatoriale a des atouts, et sa richesse lui attire des problèmes. Ceci explique pourquoi une partie de son territoire est convoitée : nous pensons aux îles de Mbagné et Corisco. Ces îles, rappelons-le, font entièrement partie de la Guinée-équatoriale ; pourtant elles lui sont injustement disputées par le Gabon, car ces îles possèdent des gisements de pétrole. Mais les historiens savent que Mbagné a toujours été équato-guinéenne. La preuve : le Gabon refuse de négocier auprès d’instances compétentes parce qu’il ne veut pas être désavoué dans son attitude ; parce que le droit international lui impose de restituer Mbagné à son voisin.
Le 5 décembre 2007, la ville de Bata a été victime d’une agression perpétuée par un groupe de voleurs dont on ignore encore l’identité et la provenance. Une seule chose est sûre, les voleurs venaient d’ailleurs. Arrivé par mer, ce groupe composé de quatre-vingt malfaiteurs environs, équipé d’armes de guerre, est entré dans Bata ; et a braqué simultanément deux établissements financiers : la SGBGE et la CCIBANK. Pour réussir leur coup, les malfaiteurs ont auparavant bouclé le périmètre sur lequel se trouvent ces établissements financiers.
Les malfaiteurs ont opéré en plein jour. Vêtus des mêmes uniformes que la garde présidentielle, ils ont semé la terreur et la confusion : ils ont ouvert le feu contre des civils innocents, et contre tous ceux qui s’opposaient à leur sale besogne. Alertées, les forces de sécurité équato-guinéennes sont intervenues, mais trop tard ; puisque les voleurs ont pris la fuite, en emportant le butin qui se chiffre à plusieurs centaines de millions de francs CFA.
Aucun des voleurs n’a été arrêté. Et cela est inadmissible. Ils sont repartis, de la même façon qu’ils avaient débarqué : par la mer, sur des bateaux rapides. La présence des agresseurs à Bata, deuxième ville du pays, a durée une trentaine de minutes.
Suite à cette agression, la population, en état de choc, a réagi en s’en prenant aux étrangers, notamment la communauté camerounaise.
Vu la gravité des faits, il appartient aux autorités équato-guinéennes de veiller sur la sécurité de tous les hommes et femmes qui vivent sur leur sol, qu’ils soient nationaux ou étrangers.
Ceux qui sont aux responsabilités ont le devoir d’informer la population sur ceux qui s’est réellement passé dans la journée du 5 décembre à Bata : des banques ont été attaquées ; des voleurs dont on ignore l’identité et la provenance ont violé notre espace territorial.
Les étrangers qui vivent en Guinée-équatoriale, certains depuis plusieurs années, y sont pour rien. Il y a des personnes qui ont choisi de vivre en guinée-équatoriale pour des raisons personnelles, familiales ou professionnelles. Ces personnes ont droit au respect et à la protection des autorités, parce qu’ils sont sur notre sol ; et surtout parce que la Guinée-équatoriale, tout ensemble terre d’accueil et pays pacifiste, ne peut pas se permettre de ternir son image à cause d’une bande de malfaiteurs. En cette période de trouble aucune communauté ne doit être le bouc émissaire.
De même, en réponse aux troubles engendrés par l’agression du 5 décembre, les équato-guinéens qui se trouvent dans les pays voisins ne doivent être ni violentés ni privés de libertés : les Etats, soulignons-le, ont le devoir de protéger, en toute circonstance, ceux qui vivent sur leur sol, qu’ils soient étudiants, travailleurs, chargés de mission ou simple résidents.
Cependant, nous observons que les équato-guinéens dans leur majorité ont été profondément émus par les événements du 5 décembre ; et ils se posent trois questions essentielles :
La première est : pourquoi les côtes de leur pays ne sont-elles pas surveillées ?
Deuxièmement, pourquoi les agresseurs ont-ils pu accoster des pirogues dotées des moteurs puissants sur le port de Nomabong, sans que cela ait attiré l’attention de la marine nationale ?
Enfin, pourquoi les forces de sécurité ont tardé à riposter, une fois que l’alerte a été déclenchée ?
En commençant cet article nous disions que la Guinée-équatoriale était un pays à la fois pacifiste et prospère : elle est en plein boom économique, grâce à ses ressources naturelles. En conséquence, elle jouit à l’heure actuelle d’énormes richesses ; c’est cette situation de pays privilégié qui lui attire des problèmes, à l’instar du conflit de Mbagné, ou de l’agression récente de Bata.
En réalité, quand un Etat a des richesses, il doit anticiper et prévoir les menaces qu’il pourrait rencontrer sur tous les plans, notamment sur son propre territoire. Quant un Etat prévoit ces menaces, il se donne les moyens soit pour écarter, soit pour anéantir les actes qui pourraient entraver la paix sociale ou mettre en péril sa souveraineté.
Compte tenu de ce qui vient de se passer à Bata, nous ne pouvons pas rester indifférents et faire comme si de rien n’était, alors que notre pays paraît vulnérable. Il appartient donc au parlement de diligenter une enquête à fin de désigner les responsables d’une situation qui ne garantit pas la sécurité de nos concitoyens ; situation qui met, du reste, en évidence les lacunes des systèmes de contrôle des côtes, des mers, des ports et des routes. L’enquête doit être menée pour que ce qui s’est passé à Bata ne se reproduise plus nulle part en guinée-équatoriale. Mbagné, Corisco et Bata ont déjà été victimes d’agressions ; ces violences doivent cesser : parce que gouverner c’est aussi savoir sécuriser.
Ndjoku Bondjale Francisco-Rafael
Le 08 décembre 2007
Fuente: propia